TEDESCHI TRUCKS BAND: Live From The Fox, Oakland (2017)

Musicians:
Susan Tedeschi - guitar & vocals
Derek Trucks - lead & slide guitar
Kofi Burbridge - keyboards & flute
Tyler Greenwell - drums & percussion
J.J. Johnson - drums & percussion
Tim Lefebvre - bass
Mike Mattison - vocals & acoustic guitar
Mark Rivers - vocals
Alicia Chakour - vocals
Kebbi Williams - saxophone
Ephraim OWens - trumpet
Elizabeth Lea - trombone

Additional musicians :
Chris Robinson - vocals
Alam Khan – vocals

Titles:
CD1 :
1. Don’t Know What It Means
2. Keep On Growing
3. Bird On The Wire
4. Within You, Without You
5. Just As Strange
6. Crying Over You
7. These Walls (featuring Alam Khan)
8. Anyhow

CD2 :
1. Right On Time
2. Leavin’ Trunk
3. Don’t Drift Away
4. I Want More (Soul Sacrifice outro)
5. I Pity The Fool
6. Ali
7. Let Me Get By

DVD :
01. Don’t Know What It Means
02. Keep On Growing
03. Bird On The Wire
04. Within You, Without You
05. Just As Strange
06. Crying Over You
07. Color Of The Blues
08. These Walls (featuring Alam Khan)
09. Leavin’ Trunk
10. I Pity The Fool
11. I Want More (Soul Sacrifice outro)
12. Let Me Get By
13. You Ain’t Going Nowhere

Bonus :
- Anyhow
- These Walls (full version) with Alam Khan

La sortie de ce double album, enregistré le neuf septembre 2016, à Oakland en Californie, donne un aperçu des shows de l’année écoulée et démontre, si besoin, l’énorme progression du groupe qui mélange superbement les morceaux des différents albums et des reprises de grands classiques toujours judicieusement choisies. Force est de constater que Derek s’éloigne de plus en plus de la musique jouée avec l’Allman Brothers Band pour proposer une véritable synthèse des musiques du Sud des USA, un cocktail de soul, funk, blues, jazz, et un léger poil de country. Cela fait penser à un genre sorte de revue comme dans les sixties avec Mad Dogs & Englishmen, voire Ike & Tina Turner, mais le bonus, et il est de taille, c’est le jeu de guitare toujours fabuleux de Derek. Des sonorités indiennes aussi avec Alam Khan un musicien du Bangla Desh qui introduit et joue du sitar dans « These Walls ». On se souvient que le Derek Trucks Band avait exploré cette musique dans plusieurs compositions. Et puis les standards comme « Anyhow », « Let Me Get By », « Don’t Know What It Means »…Et quel groupe peut jouer dans un même concert des titres de Miles Davis (« Ali »), de Léonard Cohen (« Bird On The Wire »), de George Harrison (« Within You, Without You ») et un bout de « Soul Sacrifice » de Carlos Santana ? Le TTB est déjà énorme, pourtant il n’a pas encore atteint tout son potentiel !
Michel Bertelle

 

Le couple de guitaristes Derek Trucks/Susan Tedeschi vient de sortir un album live, témoignage d’un concert enregistré le 9 septembre 2016. Á première vue, ce disque se rapprocherait quelque peu de la philosophie du défunt Allman Brothers Band (superbes solos de slide, morceaux à rallonge de près de dix minutes, volonté de privilégier l’esprit « jam », présence de deux batteurs sur scène). Mais la comparaison doit s’arrêter là et un rapide tour d’horizon de ce show convaincra les plus sceptiques.Déjà, on a affaire à un orchestre de douze musiciens (avec choristes, section de cuivres et tout le toutim). Ensuite, les titres interprétés n’ont vraiment rien à voir avec le southern rock-blues.« Don’t know what it means » s’apparente à du funk mid tempo avec une trompette free jazz en final (on se demande d’ailleurs ce qu’elle vient faire ici). « Keep on growing » (d’Eric Clapton et Bobby Whitlock, période Derek and the Dominoes) est doté d’une bonne slide mais la reprise soul de « Bird on the wire » de Leonard Cohen n’a pas droit à son solo de guitare. Pourtant, une six-cordes mélodique aurait fait grande impression sur ce morceau. Il n’y a pas à dire, la version du vieux Johnny Cash était nettement supérieure. « Within you, without you » (de George Harrison) et « Right on time » (sorte de jazz bastringue) n’apportent vraiment pas grand-chose. La ballade country-soul mélodique « These walls » est malencontreusement affublée d’une intro de sarode (un genre de sitar ou de bouzouki, c’est comme on veut. Plates excuses aux spécialistes de cet instrument). Dommage ! Une très légère ambiance Allman flotte sur « Anyhow » tandis que « Don’t drift away » propose un très bon solo de slide et sonne très « seventies » avec ses cuivres. « I want more », un titre soul/motown au rythme syncopé, se termine de façon surprenante par le « Soul sacrifice » de Carlos Santana. « Ali » (de Miles Davis) s’étire en jazz-rock au tempo médium avec un solo de batterie. L’ensemble se révèle relativement ennuyeux. « Let me get by », à l’esprit soul/blues, est coloré par un orgue aux accents (trop) jazzy. Par contre, quelques morceaux émergent de ce répertoire éclectique. « Crying over you » puise son inspiration dans le southern rock des années 70 (dans le style de Wet Willie) avec une pointe de motown et de soul. « Leavin’ trunk » se rapproche de l’Allman Brothers Band avec d’excellents solos de guitare et de slide. Et puis « I pity the fool » se tourne enfin du côté du blues avec la voix chaude de Susan Tedeschi et un bon solo de gratte. Au final, il se dégage de ce disque une impression mitigée. Il s’adresserait plutôt à des musiciens ou à des mélomanes aux goûts élargis. Les rockers purs et durs risquent sans doute de trouver cet album long et passablement indigeste. D’accord, c’est beau, c’est bien joué et cela témoigne d’une haute maîtrise technique. Mais ce n’est certainement pas du southern rock ni même du rock tout court. Ceux qui espéraient que le Tedeschi Trucks Band revisite quelques standards de l’Allman Brothers Band se sont trompés. Même s’il a tenu une place importante dans ce groupe légendaire, Derek Trucks n’a jamais eu l’intention de perpétuer cet héritage musical. D’ailleurs, il ne sera jamais un autre Duane Allman. Attention, il n’a jamais prétendu l’être. Simplement, certaines personnes ont cru intelligent de clamer haut et fort qu’il était la réincarnation du grand Duane redescendu sur terre (il faut bien vendre du papier). Derek joue admirablement bien de la guitare slide et ça s’arrête là. De toute façon, même s’ils habitent à Jacksonville en Floride, les mariés de la guitare semblent vouloir se démarquer de l’imagerie et des influences relatives à la musique sudiste. Pour preuve, il y a quelque temps déjà, suite à une demande de Road To Jacksonville au sujet d’envois éventuels d’albums à titre promotionnel, leur agent a répondu qu’il serait peut-être possible d’envisager la chose à condition que le « rebel flag » disparaisse de la page d’accueil du site. Au moment où Gregg Allman s’apprête à sortir un disque intitulé « Southern blood » (on ne se refait pas), cette volonté de paraître politiquement correct à tout prix peut étonner et même agacer. Que Derek Trucks n’oublie pas qu’il a rejoint son oncle (le regretté batteur Butch Trucks) au sein d’un groupe universellement connu pour avoir posé les jalons du southern rock. Sait-il seulement qu’en 1974, pour sa tournée européenne, l’Allman Brothers Band avait comme emblème un magnifique cavalier confédéré jaillissant d’un drapeau sudiste ? Etait-ce une idée publicitaire d’un promoteur ou cela venait-il du groupe ? Quoi qu’il en soit, personne n’avait rien trouvé à redire à l’époque. Alors, politique de l’autruche ou méconnaissance du passé familial ? Dans tous les cas, si Derek Trucks se démarque de ses racines sudistes par son attitude, il le fait aussi avec sa musique. Un concert de haute volée mais certainement pas un concert de rock n’ roll !

Olivier Aubry